Les impacts du sport sur la santé mentale ne sont pas nouveaux. Ce thème est de plus en plus abordé par les médias, les sportifs et le public. Bien qu’elle soit davantage sensible à ce sujet, la France fait encore de la santé mentale un tabou.

Le sport a des impacts positifs sur la vie de ses pratiquants, qui vont bien au-delà des bienfaits physiques tels que la perte de poids ou la tonification du corps. Nous avons discuté de l’importance du sport sur la santé mentale des sportifs avec Maroussia Paré, psychologue et athlète.

Bienfaits de l’exercice physique sur le mental

La psychologue souligne les bienfaits mentaux de l’exercice physique. Ces derniers surviennent principalement au niveau cognitif et de l’application de ressources aux divers volets de notre vie. « Le sport nous apprend plein de choses. Et mon coach a une phrase qui est très vraie et je suis d’accord avec lui : c’est que si on n’avait pas fait du sport dans plein de situations, on n’aurait pas su qu’on avait certaines ressources en nous, on n’aurait pas su qu’on avait, peut-être, telle problématique. Le sport nous oblige, quelque part, à être créatif, pas dans le sens artistique du terme, mais inventif dans le sens : quelle solution est-ce que je peux trouver à cette situation ? »

Maroussia Paré ajoute que le sport fait office d’échappatoire pour de nombreux gens, les aide à se décontracter après le travail et conduit à la fois le sportif à un « état de plénitude ». Il offre également des bienfaits au niveau social, car « ça fait du bien de partager des moments de convivialité quand on fait du sport, pas forcément avec les collègues de boulot, mais avec d’autres personnes aussi. C’est vraiment se voir dans un autre cadre, voir qu’on peut progresser aussi en dehors de ce qu’on fait le plus au quotidien, avoir cette petite porte où on peut s’exprimer vraiment ».

Fin 2022, le Royaume-Uni a lancé un projet pilote qui permet aux médecins de prescrire de l’exercice physique, comme la randonnée, la course à pied et le vélo. Le but est d’encourager la pratique du sport et de réduire le nombre de cas de maladies cardiovasculaires. Interrogée sur la possibilité d’adopter une stratégie semblable en France, le psychologue indique que « c’est une excellente stratégie », qui est d’ailleurs déjà en place au sein de son club d’athlétisme avec de graves malades – « c’est juste de se bouger et d’aller à son rythme qui fait que, voilà, on peut bénéficier des conséquences positives du sport. Donc c’est une excellente chose et c’est très bien que ce soit mis en place et proposé via un médecin ».

Effets négatifs du sport : no pain, no gain ?

Athlète de haut niveau depuis l’adolescence, Maroussia Paré a une vision plus large des bienfaits et des méfaits du sport. Membre sénior de la sélection française d’athlétisme, l’athlète olympique reconnaît que la tendance est d’amener le corps jusqu’à ses limites.

« C’est vrai que le sport de haut niveau, je le mets un peu dans une case à part, dans la pratique sportive, parce que de toute façon, tous excès ne sont jamais bons, alors on n’est pas sur des excès, on va dire d’addiction à la pratique sportive. Voilà, ce n’est pas le cas des sportifs de haut niveau, c’est encore autre chose. Mais il n’empêche qu’on pousse notre corps et notre mental tout le temps à la limite de la limite de la limite. Et, parfois, on ne récolte pas les fruits de notre travail. Donc ça peut être vraiment très déstabilisant, très frustrant, très douloureux, très décevant aussi. Et donc il se peut, par exemple, qu’on soit peut-être mal entourés, ou alors qu’on ait des blessures à répétition ou qu’on ait des difficultés personnelles, etc. »

Par ailleurs, en tant qu’athlète, Maroussia Paré est convaincue qu’en dépit des nombreux moments négatifs, les bons moments sont plus nombreux et font que le sport en vaut la peine. « Si quand même on fait la somme du positif et du négatif, effectivement, il y aura beaucoup de négatif, c’est vrai. Mais le positif ? Lorsqu’il arrive, il surpasse tellement le négatif qu’on va y retourner. On est sage, pour rien au monde, je changerais ce que je vis aujourd’hui, même si voilà, il y a des moments où ça a été extrêmement difficile. Mais pour rien au monde, je ne changerais ça, parce que ce sont des souvenirs malgré tout incroyables, même quand ils sont douloureux. Parce qu’on apprécie de voir aussi, lorsque ça s’est mieux passé, comment on a réussi à inverser la tendance et revenir. Donc effectivement, il peut y avoir un aspect négatif, plein d’aspects négatifs tels qu’on les connaît dans le sport de haut niveau. Mais le positif rattrape tout. A chaque fois ! »

Comment gérer la pression ? La psychologue souligne l’importance de l’accompagnement psychologique et alerte sur le burn-out des sportifs  : « Parce que ça peut vraiment être des périodes extrêmement compliquées, il y a des sportifs qui ont un épuisement, qui ressemblent en fait à l’épuisement professionnel, il y a des sportifs qui ont des difficultés avec l’estime de soi. » On n’est pas que sportif de haut niveau, effectivement, on a de la pression constamment ».

Comme elle le dit elle-même, cet accompagnement ne doit pas se limiter aux moments les plus stressants, mais bien concerner l’ensemble du parcours sportif. Il est également important d’avoir « une personne référente », comme un ami, pour aider à surmonter les mauvais moments.

Quel rôle l’État doit-il jouer ?

Interrogée sur l’action de l’État sur la santé mentale, Maroussia Paré défend l’éducation sur la psychologie et les émotions à l’école. Car « nos états d’âme on vit avec depuis qu’on est né et jusqu’à la fin. Donc ça serait peut-être bien que sans pour autant aller chez le psychologue, on ait une meilleure connaissance de soi. On a des capacités à mieux vivre ensemble et comprendre aussi ce que l’autre peut ressentir à certains moments. Je pense que ça mériterait, au même titre que l’éducation sexuelle, on peut avoir des sessions d’éducation, éducation psy, éducation émotionnelle et compétences en communication. »

Psychologue et athlète de haut niveau, Maroussia Paré reconnaît le besoin de préparation mentale dès l’enfance. La Fédération française d’athlétisme a fait les premiers pas dans cette direction.

« Après s’être surpassé, on se sent mieux »

La gestion du stress est importante pour une poursuite saine de la pratique sportive. Maroussia Paré explique comment après avoir surmonté une épreuve sportive « on se sent plus apaisé, on se sent fiers de nous et donc on aborde la journée vraiment, vraiment, vraiment différemment ». Commencer sa journée par le sport est pour la psychologue et l’athlète un moyen de démarrer la journée avec davantage d’énergie et de confiance.

Il faut parvenir à un équilibre qui permette aux athlètes, professionnels ou amateurs, de tirer profit de la discipline sportive qu’ils pratiquent, que ce soit en salle de sport, dans un club ou en plein air. Le but est que le sport suscite une vie plus saine sous tous ses aspects et n’entraîne en aucun cas un mal-être physique et psychologique.